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Le contexte caribéen
Avec 33 espèces de cétacés recensées sur les 90 connues dans le monde, la région des Caraïbes se positionne comme l'un des points chauds de la biodiversité pour ces mammifères marins. Ces eaux, représentant moins de 1 % de la surface des mers et des océans, abritent une incroyable diversité, allant des dauphins côtiers résidents aux baleines migratrices comme les majestueuses baleines à bosse. Cette richesse témoigne de l'importance écologique des Caraïbes, où des habitats variés, tels que les récifs coralliens et les zones pélagiques profondes, constituent des refuges essentiels pour les cétacés. Une telle diversité fait des Caraïbes une région clé pour la recherche et la conservation de ces espèces fascinantes.
Sur les 33 espèces de cétacés recensées dans la région des Caraïbes, 7 sont des mysticètes, également appelés baleines à fanons, dont des espèces emblématiques comme la baleine à bosse, la baleine bleue et le rorqual commun. Les 26 autres sont des odontocètes, ou baleines à dents, comme le cachalot, le grand dauphin, le globicéphale tropical et l'orque. Ces cétacés se répartissent entre espèces résidentes, qui restent dans la région toute l'année, et espèces migratrices, qui viennent dans les Caraïbes à des périodes spécifiques, notamment pour la reproduction. Cette diversité souligne l'importance des Caraïbes comme zone clé pour la préservation des habitats marins, tant pour les espèces sédentaires que pour celles effectuant de longues migrations.
Caraïbes : une biodiversité unique sous pression
Malgré une biodiversité exceptionnelle, la situation des cétacés dans les Caraïbes reste préoccupante et insuffisamment documentée. Les efforts de recherche, encore limités dans la région, ne permettent pas d'établir un état des lieux clair et complet pour toutes les espèces présentes. Si cinq espèces sont déjà classées comme menacées d'extinction selon la Liste rouge de l'UICN, la majorité des autres cétacés demeurent dans une situation incertaine, faute de données suffisantes. Ce manque de connaissances fait craindre que certaines populations soient menacées sans que cela ne soit détecté, rendant toute action de conservation difficile.

IUCN categories of global conservation status of cetaceans (The figure corresponds to the number of cetaceans belonging to the given category)
Dans cette optique, la Caribbean Cetacean Society s'engage à fédérer les pays des Caraïbes et à dépasser les frontières humaines pour contribuer activement à la conservation des cétacés de la région. Sa mission repose sur une approche collaborative alliant recherche scientifique, sensibilisation des communautés locales et coopération internationale. L'objectif est d'harmoniser les réglementations et d'adopter des pratiques humaines responsables afin de réduire les pressions et les perturbations qui menacent ces espèces essentielles aux écosystèmes marins.
Pourquoi devons-nous sauver les cétacés ?
Les cétacés, comme toutes les espèces, jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes marins, contribuant à leur équilibre et à leur fonctionnement global. Qu'il s'agisse de baleines à fanons, de baleines à dents ou de dauphins, ces animaux influencent la structure de leur environnement par leurs interactions écologiques complexes.
Au cœur du cycle du carbone
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Les cétacés, et plus particulièrement les baleines, jouent un rôle essentiel dans le cycle du carbone. Le rorqual commun (Balaenoptera physalus), par exemple, est l'un des plus grands animaux ayant jamais existé sur Terre. Grâce à sa taille et à sa longévité exceptionnelle, ce cétacé peut contribuer à une accumulation significative de carbone. En particulier, lorsqu'ils meurent naturellement, ces individus coulent au fond des océans et permettent une séquestration durable du carbone : ce phénomène est appelé Whale falls.
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Cependant, parmi les nombreuses menaces existantes, la surexploitation due à la chasse commerciale à la baleine a, à elle seule, réduit drastiquement cette capacité, à tel point que l'on estime que cette activité aurait réduit la biomasse des grandes baleines de 81 %. Alors qu'on estimait que 11 millions de tonnes de CO2 étaient stockées par an avant l'intensification de la pêche industrielle, cette capacité aurait augmenté à 2 millions de tonnes par an. Ce déficit favoriserait une plus grande quantité de CO2 dans l'environnement.
Espèces ingénieures​
Le terme « espèces ingénieures » désigne les espèces capables d'avoir un impact positif sur l'environnement et de favoriser la croissance de la biodiversité. Les cétacés, en tant qu'espèces ingénieures, jouent un rôle essentiel dans la fertilisation des océans, stimulant la productivité et la dynamique des écosystèmes marins.
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Par leurs défécations, ils libèrent de grandes quantités de nutriments essentiels et souvent limitants, notamment de l'azote, du phosphore et des oligo-éléments (par exemple, le fer). Chez les cachalots (Physeter macrocephalus), le transport de ces nutriments limitants des profondeurs vers la surface (également appelé Whale pump) peut améliorer la production de phytoplancton dans la zone photique.
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Les déchets de ces espèces agissent ainsi comme des engrais qui stimulent la productivité du phytoplancton. Cela crée un cercle vertueux : plus il y a de cétacés, plus les nutriments sont disponibles pour le phytoplancton, qui nourrit le zooplancton, un animal situé à la base de la chaîne alimentaire. Par exemple, on estime que les baleines à elles seules augmentent la productivité mondiale du phytoplancton de 1 %. Ainsi, ces animaux ne sont pas seulement des prédateurs, mais aussi des vecteurs actifs de nutriments, soulignant leur rôle fondamental dans le cycle biologique global et la productivité des océans.

- Gilbert, L., Jeanniard-du-Dot, T., Authier, M. et al. The composition of global cetacean communities shapes their contribution to ocean nutrient cycling. Nat Commun 14 , 5823 (2023). https://doi.org/10.1038/s41467-023-41532-y
- Pearson, Heidi C., Matthew S. Savoca, Daniel P. Costa, Michael W. Lomas, Renato Molina, Andrew J. Pershing, Craig R. Smith, Juan Carlos Villaseñor-Derbez, Stephen R. Wing, and Joe Roman. 2023. “Whales in the carbon cycle: can recovery remove carbon dioxide?” Trends in Ecology & Evolution 38 (3): 238‑49. https://doi.org/10.1016/j.tree.2022.10.012.
- Stéphan Jacquet. A NEW ECOLOGICAL ROLE ATTRIBUTED TO WHALES. Subaqua (Marseille), 2022, 301, pp.68-69. ffhal-03770063f